L’illusion de la communication


Informer ou communiquer ? Comprendre la différence pour une organisation performante


Sur le terrain, je vois souvent des organisations persuadées qu’elles communiquent bien, alors qu’elles ne font qu’informer. Elles envoient des emails, publient des annonces sur l’intranet, organisent des réunions… et pourtant, les collaborateurs continuent à dire qu’ils ne savent pas ce qui se passe, qu’ils ne comprennent pas la direction prise, qu’ils ne se sentent pas impliqués, qu’ils ne voient pas de vision.


Pourquoi ? Parce qu’on confond information et communication. Parce qu’on pense qu’envoyer un message équivaut à être compris. Parce qu’on croit que les faits suffisent à convaincre. Mais un message, ce n’est pas qu’un contenu, c’est aussi la manière dont il est porté, reçu et vécu.

Informer vs. communiquer : une différence fondamentale


L’information, c’est essentiellement un processus descendant, souvent unidirectionnel : on transmet des données, on demande des données, on donne des instructions, on partage des chiffres. Elle peut être essentielle, mais reste passive tant qu’elle ne suscite pas d’engagement.


La communication, en revanche, est un processus interactionnel. Elle ne consiste pas seulement à parler, mais à s’assurer que l’autre a compris, intégré et fait sien le message. Communiquer, c’est donner du sens, c’est transformer une information en une dynamique qui crée de l’adhésion.


Prenons un exemple que je vois trop souvent :


• Un dirigeant envoie une note interne annonçant un changement stratégique
→ il informe.

• Un manager réunit son équipe, explique pourquoi ce changement est nécessaire, partage ses convictions, écoute les réactions et ajuste son discours → il communique.
La nuance est énorme. Dans un cas, on impose un message ; dans l’autre, on engage une conversation.

Pourquoi l’information descendante ne suffit pas


Ce que je vois sur le terrain, ce ne sont pas des équipes démotivées par manque d’informations. Ce sont des équipes démotivées par manque de sens. Combien de fois ai-je entendu des collaborateurs dire :


• “On nous bombarde de mails, mais personne ne nous explique pourquoi on fait tout ça.”


• “On nous fixe des objectifs de productivité, sans considérer l’impact réel sur notre travail.”


• “On nous parle d’engagement, mais nos managers ne nous écoutent pas.”


Dans beaucoup d’organisations, on parle de performance, d’efficacité, de productivité. On fixe des chiffres, des KPIs, des deadlines. Mais on oublie que derrière ces objectifs, il y a des êtres humains qui ont besoin de comprendre, adhérer et donner du sens à leur travail.


Et c’est là que je vois une erreur fréquente : les leaders poussent vers le résultat sans expliquer le pourquoi. Ils pensent que le sens est implicite, que l’évidence suffit à mobiliser. Or, ce n’est pas le cas. Le sens, c’est l’énergie qu’on insuffle dans le système. C’est ce qui fait qu’un projet est porté avec conviction plutôt qu’exécuté mécaniquement.


Une transformation réussie ne repose pas uniquement sur des objectifs chiffrés : elle demande un récit qui fédère. Les entreprises qui réussissent sont celles où les leaders prennent le temps de traduire la stratégie en un message clair et engageant, où ils donnent du sens avant d’exiger des résultats.

Comment transformer l’information en communication efficace


Je vois des managers qui tentent de mieux communiquer, mais qui s’y prennent mal. Ils envoient plus d’emails, multiplient les réunions, ajoutent des rapports. Ils pensent qu’en mettant plus d’information, ils amélioreront la communication. Mais ce qu’ils oublient, c’est le lien humain. Et donc du temps et de l’espace. Alors quoi ? Voici ce que je conseille le plus souvent:

Regarder les personnes dans les yeux
Avant même de parler, il faut exister dans la relation. Un regard, une posture ouverte, une présence authentique. Parce que si dès les premières secondes tu lis tes notes ou fixes ton écran, ton message est déjà affaibli.

Raconter ton histoire : ce qui te motive, ce qui fait sens pour toi


Si toi-même, en tant que leader, tu ne crois pas à ce que tu dis, comment veux-tu que ton équipe y adhère ? Il ne s’agit pas de vendre du rêve, mais d’expliquer pourquoi cette mission est importante, même si elle n’est pas plaisante. Si elle est contrainte, il faut le dire. Les collaborateurs peuvent comprendre des décisions difficiles, à condition qu’on leur donne les raisons réelles.

Donner de l’espace à l’équipe : leur demander ce que cela signifie pour eux. On ne peut pas imposer un message et attendre une adhésion immédiate. La frustration fait partie du processus. Il faut laisser de l’espace aux réactions et amener les collaborateurs à trouver eux-mêmes du sens dans ce qu’on leur demande.


Une question clé à poser : »Comment ce projet peut-il faire sens pour toi, une fois la frustration passée ? »
Quand on pose cette question, on change la dynamique. On transforme une contrainte en un levier de réflexion. Les collaborateurs deviennent acteurs du sens, au lieu d’être de simples exécutants.

Soutenir cette dynamique avec une communication interne cohérente


Le rôle de la communication interne est de renforcer ce travail relationnel, pas de le remplacer. Les outils digitaux, les newsletters, les messages corporate doivent prolonger les échanges terrain, pas les contredire.


Une communication efficace ne se limite pas à transmettre un message, elle doit le porter sur plusieurs niveaux : le relationnel, l’opérationnel et le stratégique. Je ne pense pas que l’on motive une équipe avec des chiffres. On la motive avec une vision, un projet incarné, un message qui fait écho à ce qu’elle vit au quotidien. Alors, la prochaine fois que tu dois transmettre un message clé, pose-toi ces trois questions :

Ai-je pris le temps de créer du lien avant de parler ?

Ai-je expliqué pourquoi ce sujet compte pour moi ?

Ai-je permis à l’équipe de donner du sens à ce projet, au-delà de la contrainte ?

Si la réponse est non, alors tu es encore dans l’information, pas dans la communication.

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